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Les Carburants alternatifs aéronautiques

31 janvier 2016 Lettre 3AF
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1. Introduction

Dans la quête constante de réduction de l’empreinte environnementale de l’aviation, les carburants alternatifs issus de la biomasse ou de sources renouvelables, présentent un certain nombre d’avantages: réduction des émissions de CO2 et chimie souvent simple bénéfique à la réduction des particules fines.

Aujourd’hui, 3 filières distinctes de carburants alternatifs sont qualifiées via l’organisme normalisateur international qu’est l’ASTM (American Society for Testing and Materials) et peuvent être utilisées par l’aviation commerciale. Ces filières permettent d’ores et déjà d’utiliser des ressources variées avec la possibilité technique d’utiliser des matières premières comme de l’huile végétale, des résidus forestiers, du sucre, voire même des déchets ménagers. Néanmoins, le processus de qualification qui garantit la sécurité d’utilisation reste complexe et de nombreux points nécessitent encore des développements afin de permettre aux carburants alternatifs de se développer : cadre législatif cadre financier adapté, activités de R&D afin d’améliorer le rendement et la rentabilité de ces filières, tant au niveau de la matière première que des procédés de transformation.

Le présent article vise à présenter le contexte dans lequel se placent ces développements et faire l’état des lieux des filières développées ou en cours de développement. Un focus est également fait sur le processus de qualification et certains aspects qu’il ne couvre pas (impacts environnementaux, impacts longs termes sur les matériels, etc.).

 

2. Le carburéacteur

La qualité du carburant est fondamentale pour le bon fonctionnement des aéronefs. Contrairement aux idées reçues, ce carburant ne sert pas uniquement de source d’énergie par combustion dans les turbines, mais est également utilisé pour de nombreux autres usages tels que le refroidissement du lubrifiant, le chauffage de l’air cabine, l’alimentation de l’APU (Auxiliary Power Unit). Il en résulte une extrême complexité de l’architecture des circuits carburant et un besoin crucial d’assurer la totale compatibilité du carburant avec l’ensemble des organes rencontrés (pompes, filtres, jauges…).

De plus, les conditions d’utilisation de ce carburant peuvent être extrêmement variables (fortes variations de température et de pression, nécessité d’assurer l’alimentation des réservoirs quelle que soit l’inclinaison de l’avion…) et imposent une maîtrise des propriétés carburant et de leur évolution avec les contraintes extérieures. Par exemple la densité et la tension de vapeur évoluent de façon importante avec la température rencontrée par le carburant qui peut aller de 40°C au sol par une journée chaude jusqu’à -80°C en altitude lors d’une journée froide.

Ces contraintes ont dû être prises en compte, et l’ensemble des systèmes carburant des aéronefs a été conçus pour être en parfaite adéquation avec les propriétés du carburéacteur.

Parmi les caractéristiques qui intéressent au premier plan les constructeurs, on peut notamment citer :

La tenue à froid du carburant qui impacte directement le pompage du carburant et la pulvérisation de celui-ci dans les conditions extrêmes rencontrées. Ce comportement à froid est décrit par des caractéristiques telles que la viscosité, le point de disparition des cristaux, la tension de surface, les caractéristiques de distillation, la capacité calorifique ou la température d’auto-inflammation.

Les caractéristiques de combustion et les capacités d’allumage et de rallumage en vol. On peut notamment citer le contenu énergétique, la volatilité, les capacités d’auto-inflammation…

Les caractéristiques de compatibilité avec les matériels existants. Elles sont nombreuses, allant de la compatibilité matériaux (teneur en aromatiques…) à la durabilité via les phénomènes de corrosion (eau, teneur en soufre, acidité) ou de dépôts (composition chimique, distillation, stabilité thermique)

Les caractéristiques liées à la logistique et sa sécurité (point éclair, volatilité)

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Fig. 1 : Principaux impacts carburant sur le fonctionnement des turbines aéronautiques.

La figure 1 résume les principaux impacts carburant sur la turbine sachant que les impacts sur l’aéronef lui-même ne doivent pas être oubliés (rayon d’action lié au contenu énergétique et à la densité du carburant, compatibilité avec le système carburant avion).

 

Pour un carburant fossile, ces propriétés sont bien maîtrisées et des valeurs de références sont disponibles, notamment via le CRC (Coordinating Research Council) qui édite l’ « Aviation Fuel Properties Handbook » dans lequel l’ensemble des propriétés typiques des jet-fuels sont consignées. 

La limitation des moyens de production de jet-fuels à quelques procédés précis et la mise en place de spécifications sur les produits distribués permettent alors d’assurer la totale compatibilité des carburants distribués avec les infrastructures et matériels existant.

Le carburéacteur est alors défini comme un produit pétrolier liquide répondant à une spécification donnée (ASTM D1655, DefStan 91-91…). La définition ne précise pas la composition chimique exacte du produit. Cette composition est donc variable, et un carburéacteur est constitué de milliers de molécules dont le mélange global permet l’atteinte des propriétés macroscopiques requise pour son usage (figure2).

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Fig. 2 : Composition chimique classique d’un carburéacteur Jet A1 (IFPEN) & courbe de distillation (CRC)

 

3. Le contexte lié au développement des carburants alternatifs

Comme indiqué précédemment, le carburéacteur est un produit extrêmement intéressant par ses propriétés (tenue à froid, contenu énergétique) et dont la logistique et la qualité sont parfaitement maîtrisées, et ceci en tout point du globe. C’est également le seul produit pétrolier dont la qualité soit cohérente au niveau international.

Dans ce contexte, le recours aux carburants alternatifs peut alors sembler surprenant, voir risqué, tout carburant alternatif devant alors présenter au moins les mêmes avantages que les carburéacteurs d’origine fossile mais il est fortement motivé par les raisons suivantes :

  • La nécessité de réduire les émissions de CO2 du transport aérien
  • Le bénéfice attendu sur la réduction des particules fines
  • La recherche de diversification des ressources (raisons géostratégiques mais aussi financières).

3.1. Réduction des émissions de gaz à effet de serre

L’aviation commerciale utilise aujourd’hui exclusivement un carburant liquide en provenance du raffinage du pétrole et représente environ 6 % de celui-ci. La consommation énergétique des différents moyens de transport a été de 13 % de la consommation énergétique globale en 2011, dont 74 % pour le transport routier et environ 6 fois moins pour l’aviation. Les émissions de CO2 de l’aéronautique civile, directement proportionnelles à la consommation de kérosène, ont été de 705 Mt en 2013, à comparer à l’ensemble des émissions anthropiques de 34 Mdt (données Airbus). L’aéronautique civile intervient donc pour environ 2 % des émissions anthropiques de CO2 et 12% des émissions de CO2 de l’ensemble du transport. 

Cela peut paraître faible néanmoins, si le transport aérien était considéré comme un pays, il apparaitrait en 8ème position dans le classement mondial, juste après l’Allemagne. D’autre part si l’accroissement du trafic aérien se maintient sur plusieurs décennies (doublement potentiel entre 2030 et 2050), et si les émissions de CO2 anthropiques hors trafic aérien sont réduites significativement pour respecter un objectif de +2°C (ou même +1.5°C) à la fin du siècle, la part du CO2 aérien pourrait dépasser 10% en 2050. Enfin, outre le CO2, les trainées de condensation en croisière et les cirrus induits, participent au réchauffement climatique.

Afin de limiter cette augmentation, des objectifs ambitieux ont été annoncés, tant au niveau de la recherche (objectifs Européens ACARE) qu’au niveau des compagnies aériennes elles-mêmes (objectifs « IATA / ATAG ») et de l’OACI (Organisation de l’Aviation Civile Internationale) : 

Au niveau technologique, l’ ACARE (Advisory Council for Research and Innovation in Europe) vise dans son Strategic Research and Innovation Agenda une réduction de 75% des émissions de CO2 des meilleurs technologies en 2050 par rapport aux technologies de 2000 (par km passager) (figure 3).

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Fig. 3 : Objectifs ACARE et évolution du CO2 de l’aviation avec l’hypothèse ACARE (Forum-ae)

 

Au niveau de la flotte mondiale, ATAG (Air Transport Action Groupe, regroupant les membres de IATA (International Air Transport Association) et les industriels du monde aéronautique) vise une stabilisation des émissions de CO2 à partir de 2020 (« Carbon Neutral Growth) et une réduction globale des émissions de CO2 de 50% en 2050 par rapport à leur niveau de 2005. Les carburants alternatifs sont considérés par ATAG comme une des briques indispensables à l’atteinte de cet objectif ambitieux. Quant à l’OACI, la résolution A38-17/2 de l’OACI, adoptée au niveau des Etats, propose un gain annuel d’efficacité de 2 % (par passager km en moyenne dans la flotte mondiale) et un objectif de stabilisation des émissions à leur niveau de 2020 (« carbon neutral growth »).

Ces objectifs au niveau de la flotte mondiale ne pourront être atteints que par le déploiement de technologies avancées, à la fois au niveau de l’aéronef (aérodynamique, masse), du moteur (rendement), de l’optimisation du trafic aérien et aéroportuaire. Les travaux menés au sein de CAEP (Committee on Aviation Environmental Protection) de l’OACI ont montré que les seuls progrès techniques et opérationnels ne seront pas suffisants. Les estimations faites par le projet Européen FORUM-AE montrent également qu’avec une hypothèse optimiste où toute la flotte mondiale en 2050 serait équipée de technologies respectant l’objectif ACARE 2050 (-75%) CO2, l’objectif ATAG de réduire les émissions de CO2 par 2 par rapport à 2005, ne serait pas atteint. Il y a donc un écart qui peut être partiellement comblé par l’introduction de biocarburants à empreinte CO2 réduite.

Les biocarburants peuvent participer fortement à cette réduction des émissions de CO2, moyennant un bilan positif sur l’ensemble de leur cycle de vie (figure 4). En effet, les carburants produits à partir de matières organiques (plantes, déchets de végétaux, sucres, huiles…) entraînent des émissions de gaz à effet de serre lors de leur production et de leur usage, mais une partie de ces émissions sont compensées par le CO2 capté dans l’atmosphère par la plante lors de sa croissance.

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Fig. 4 : Émissions CO2 équivalent pour un carburant fossile (gauche) et un biocarburant (droite) (Qantas)

 

Néanmoins, les différents rendements de conversion des filières, les émissions de gaz à effet de serre autres que le CO2 (N2O en provenance des engrais azotés par exemple), ainsi que l’impossibilité dans la plupart des cas d’utiliser l’intégralité de la plante, font que la plupart des filières présentent des réductions d’émissions en équivalent CO2 non pas de 100%, mais entre 50 et 80% en fonction de la matière première, des procédés de transformation, de la logistique associée…

L’évaluation précise du bilan environnemental de chaque filière est extrêmement complexe et nécessite de prendre en compte de nombreux facteurs, tels que les rendements agricoles, les éventuels intrants (engrais), l’efficacité des récoltes, la logistique des différents produits, les rendements de conversion…et des éléments encore plus abstraits tels que les changements d’affectation des sols (directs ou indirects) si, par exemple, on remplace une culture existante ou une biomasse existante par une culture énergétique. Les méthodologies de calcul font actuellement l’objet de nombreux travaux au niveau national et international. Au niveau aéronautique, un travail extrêmement important est actuellement réalisé au sein de l’OACI / CAEP pour proposer, d’ici 2016, une méthode d’évaluation harmonisée applicable à l’ensemble des biocarburants aéronautiques. Par ailleurs, il est important de rappeler que l’analyse de cycle de vie d’une filière de production de carburant alternatif à partir de cultures à vocation énergétique, n’indique pas le rendement de cette filière, c’est-à-dire la quantité de kérosène de synthèse qui pourra être produite par unité de surface cultivée. Il convient donc d’ajouter à cette analyse des projections de capacité de production.

 

3.2. L’impact sur les émissions polluantes hors CO2

Outre les émissions de CO2, la combustion dans les turbines aéronautiques entraîne la formation de polluants classiques tels que les oxydes d’azote (NOx) ou les particules. Ces dernières sont formées dans la chambre de combustion par la présence de zones riches en carburant. Elles ont un impact sur la qualité de l’air en proximité d’aéroport, mais aussi possiblement sur le climat via leur participation à la formation des traînées de condensation, ces fameuses traînées blanches laissées dans le ciel par temps calme et froid, constituées de mini-cristaux de glace (figure 5).

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Fig. 5 : Émissions de particules des aéronefs et impacts potentiels.

 

De nombreux travaux sont menés par les motoristes afin de réduire les émissions de particules, et il semble que la combustion dite « pauvre » développée pour la réduction des NOx soit très bénéfique à la réduction des particules fines. En parallèle, une nouvelle norme sur les particules fines est en cours de développement par l’OACI / CAEP, et devrait porter à terme tant au niveau de la masse de particules que du nombre.

Afin d’aller plus loin dans la réduction de ces émissions, le carburant peut avoir un impact fondamental, via ses propriétés physiques (densité, viscosité, volatilité…) mais également sa composition chimique. Il a en effet été montré que les aromatiques, molécules présentes naturellement dans le carburéacteur, étaient des précurseurs importants de suies. Aux émissions de ces particules fines, s’ajoutent également des aérosols sulfatés provenant de l’oxydation du soufre, présent naturellement dans le carburant. 

Les carburants alternatifs font appel à de nouveaux procédés et de nouvelles techniques qui peuvent permettre d’accéder facilement à des compositions chimiques jusque-là difficilement atteignables, avec notamment certains carburants ne contenant pas d’aromatiques ni de soufre. Ces carburants pourraient donc présenter un intérêt environnemental fort, au-delà du côté CO2. Des essais menés sur des turbines CFM56 avec différents carburants alternatifs sans aromatiques et sans soufre ont ainsi montré un potentiel de réduction allant jusqu’à 50% des émissions de particules (figure 6).

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Fig. 6 : Impact de l’ajout de l’utilisation de carburants alternatifs 0 aromatique / 0 Soufre sur les émissions de particules de turbines CFM56. (« FT »= « Fischer-Tropsch ». « HRJ »=Hydrotreated Renewable Jet)

 

La réduction des émissions polluantes des turbines n’est pas un critère en soi dans le cahier des charges de développement d’une filière de carburants alternatifs et certaines filières sont susceptibles au contraire d’avoir des impacts mitigés sur ces émissions. Néanmoins, les filières les plus vertueuses via leur chimie , doivent être privilégiées du point de vue du motoriste mais aussi de l’avionneur.

 

3.3. Impact logistique / économique

Le transport aérien, civil ou militaire, est totalement dépendant des carburants liquides. Si un certain degré d’électrification des aéronefs est actuellement observé, cette électrification n’est pas envisagée pour la propulsion elle-même (sauf démonstrations spécifiques telles l’e-Fan d’Airbus). Les carburants liquides resteront donc pendant de nombreuses années le vecteur énergétique principal du transport aérien, ce qui a deux conséquences immédiates :

Conséquence économique : le transport aérien est totalement dépendant du cours du brut, avec des variations extrêmement importantes.

Cette variation du prix du carburéacteur est critique vis-à-vis de l’équilibre économique des compagnies aériennes, et encore plus des compagnies low-cost. Durant l’été 2008 le carburant a représenté jusqu’à 45% des coûts opérationnels de certaines compagnies low-cost. Des chiffres récents, publiés par le US Bureau of Transportation Statistics, ont montré que le coût total du carburant pour une compagnie comme United Airlines a été réduit de 70% au premier trimestre 2015 en comparaison avec la période équivalente 2014, alors que la consommation n’était dans le même temps réduite que de 1.3%.

Afin d’éviter ces fluctuations importantes, la plupart des compagnies aériennes mettent en place des politiques de couverture. La couverture permet aux compagnies aériennes de se prémunir contre les risques liés aux fluctuations du prix du carburant. 

Le recours aux carburants alternatifs peut-il, dans ces conditions, avoir un impact positif sur l’aspect coût ? La première réponse pourrait être non, car aucune des filières actuellement certifiées ne permet de produire un carburant alternatif durable compétitif en termes de coûts avec le carburéacteur fossile. La diminution future des coûts de ces carburants liée à l’augmentation des capacités de production et l’augmentation prévue à long terme du prix des carburants fossiles en raison de leur caractère fini, ainsi que la mise en place éventuelle de législations liées aux émissions de gaz à effet de serre (« taxes carbone » ou autres) pourraient cependant dans le futur amener à un niveau de coût acceptable. Mais de nombreuses questions subsistent, et notamment celle du lien fort existant généralement entre le prix du pétrole et celui de la biomasse énergétique.

Conséquence géopolitique : la dépendance à une mono-énergie peut être considérée comme un risque, principalement pour les forces militaires. Pendant un certain nombre d’années, l’US Air Force a été à l’origine d’un grand nombre de projets de recherche sur la thématique des carburants alternatifs, principalement dans le but de certifier ses aéronefs militaires à l’utilisation de ces carburants et ainsi prévoir des solutions de repli face à une éventuelle rupture d’approvisionnement. Il convient cependant d’admettre qu’avec le développement de l’industrie des pétroles de schiste sur leur territoire national, cet aspect géostratégique semble avoir perdu de son attrait ces deux dernières années pour les militaires américains.

De plus, la production de carburants avec des ressources locales telles que les cultures énergétiques ou les déchets pourrait également représenter un vivier de développement économique, d’emplois ou encore de maintien de l’activité agricole dans les zones rurales.

 

4. Le processus de certification

La conception et l’utilisation d’aéronefs commerciaux est régie par les autorités de sûreté aériennes nationales ou les agences telles que la FAA (Federal Aviation Administration) aux USA ou l’EASA (European Aviation Safety Agency) en Europe. Les carburants utilisés par ces aéronefs, quelle que soit leur provenance, doivent donc respecter les propriétés et les besoins en performances exigés par les fabricants de moteurs et d’aéronefs et être approuvés par les autorités de sureté aériennes.

Assurer le maintien des performances est extrêmement complexe. Il est inenvisageable de tester l’ensemble des matériels dans l’ensemble des conditions possibles. La nécessité d’une procédure commune permettant cette validation s’est donc vite imposée. Les acteurs des domaines aéronautique et carburant ont donc collaboré avec la FAA et l’EASA afin de développer une procédure de qualification et de certification pour les nouveaux carburéacteurs alternatifs dits « drop-in ». Cette procédure fait appel au sous-comité « carburants » de l’ASTM International, organisme de normalisation initialement américain mais se voulant de plus en plus international afin de coordonner l’évaluation des données fournies et l’établissement des critères de spécification pour ces nouveaux carburants. Ce sous-comité a donc édité une norme afin de clarifier ce processus: la norme ASTM D4054 (« Standard Practice for Qualification an Approval of New Aviation Fuels and Fuel Additive »). A cette norme s’ajoutent les 2 normes de qualité carburant : l’ASTM D1655 régissant la qualité du carburéacteur mis sur le marché et l’ASTM D7566 régissant la qualité des carburants alternatifs. Pour clarifier, un acteur du domaine souhaitant certifier une nouvelle filière de carburéacteur devra suivre le protocole décrit par l’ASTM D4054 (figure 7). Une fois ce protocole terminé, une spécification de qualité est écrite et ajoutée à la norme ASTM D7566. 

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Fig. 7 : Processus de certification global (IATA) & processus de qualification selon la norme ASTM D4054

 

Un nouveau carburant peut alors être mis sur le marché à condition :

  • Qu’il respecte la spécification de qualité décrite dans l’ASTM D7566, en respectant les protocoles de mélange décrits dans cette norme (et notamment le taux maximal d’incorporation)
  • Que le mélange final respecte la spécification de qualité décrite dans l’ASTM D1655.

 

Cette procédure suppose fondamentalement le caractère «drop-in » du carburant dont la définition est la suivante : il s’agit d’un carburant pouvant se substituer en partie ou en totalité au jet fuel conventionnel sans impact opérationnel (pas de modification des infrastructures, notamment au niveau des aéroports) ni modification des avions et des moteurs existants ou en cours de développement. Ce concept s’explique car la mise au point d’un nouvel avion de transport de grande capacité nécessite une dizaine d’années et un investissement de l’ordre d’une dizaine de milliards d’euros, et la durée de vie d’une famille d’avions peut dépasser soixante ans (par exemple le Boeing 747 a fait son premier vol en 1969 et sa dernière version, le 747-8, volera vraisemblablement encore trente ans).

Ainsi, les carburants « drop-in », qu’ils soient issus de ressources fossiles ou de la biomasse, doivent satisfaire certaines exigences, dont la première est de ne pas remettre en cause la certification des matériels, leurs manuels d’utilisation et le processus de certification de nouveaux matériels annexes. 

Le processus de certification d’un carburant « drop-in » est un processus séquentiel, basé sur un protocole précis décrivant l’ensemble des données nécessaires.
Ces essais sont divisés en 4 catégories :

  • « Specification properties » (Tier 1) : vérification de la cohérence des propriétés du carburant avec les spécifications du carburéacteur.
  • « Fit-For-Purpose Properties » (Tier 2) : vérification de la compatibilité du carburant avec les propriétés classiques du carburéacteur. On vérifie par exemple la compatibilité avec les matériaux utilisés dans l’ensemble de la logistique carburant ou encore l’évolution de certaines propriétés avec la température (viscosité, densité…). A chaque fois, les données obtenues sont comparées avec celles d’un carburéacteur fossile, données fournies par l’ « Aviation Fuel Properties Handbook » du CRC. Tout écart de comportement doit être expliqué et des essais éventuels doivent être réalisés.
  •  « Component / Rig Testing » (Tier 3) : vérification de la compatibilité du carburant avec les organes moteur / avion à l’aide de tests spécifiques développés par les industrielsmotoristes (injection, limites de richesse de combustion, essai spécifique de stabilité à l’oxydation…)
  •  « Engine / APU Testing » : essai de combustion en turbine réelle ou APU.

Ces essais vont du plus simple vers le plus complexe. Si les essais Tier 1 nécessitent généralement quelques litres de carburant, les essais Tier 4 nécessitent plusieurs dizaines de m3. Ce processus n’est pas figé, il n’est pas indispensable de procéder à l’ensemble des essais. Il est cependant nécessaire de prouver que le carburant proposé se comporte de façon similaire à un carburant standard. Cela peut passer par la réalisation complète des essais, mais peut également faire l’objet de justifications liées par exemple à la composition chimique. Complétés d’analyses techniques, ils sont ensuite compilés dans un rapport de recherche et soumis aux industriels, accompagné d’une proposition de spécification carburant. Ceux-ci étudient le rapport, le commentent, demandent éventuellement des précisions ou compléments, parfois même des essais complémentaires, via un processus itératif sans limite de durée. Une fois le rapport validé, le processus de révision et de vote par les membres ASTM débute. Tous les membres votant sont sollicités, peuvent soumettre des commentaires / suggestions / questions / doutes, l’ensemble de ces remontées devant être formellement traitées avant l’acceptation finale du document.

Enfin, il faut souligner que ce sont les filières qui sont certifiées, c’est-à-dire le mode de production du carburant et non la chimie du carburant. Ces filières sont cependant certifiées avec des contraintes en terme de composition chimique, afin d’assurer la cohérence du produit entre les différentes unités de production. Ainsi, on ne certifie par un carburant contenant X% de paraffines et Y% d’aromatiques, mais un carburant en provenance d’un procédé « Z » et respectant un certain nombre de critères de formulation assurant de son caractère « drop-in ».

  • Le processus ci-dessus garantit la sécurité d’utilisation et la compatibilité avec les aéronefs et les infrastructures aéroportuaires, mais ne couvre pas les aspects importants suivants :
  • L’impact environnemental : 
  • L’impact à long terme, notamment en termes de maintenance et de coûts opérationnels. Par exemple, la certification d’un carburant alternatif ne comporte pas spécifiquement d’essai d’endurance moteur, et encore moins d’essais en flotte. 
  • L’assurance qualité de la « supply chain » : la certification du carburant impose le respect d’une qualité produit, mais n’étudie pas la logistique associée. La présence de contaminants lors de la manipulation du produit par un opérateur nouvel entrant dans la filière pourrait en effet être catastrophique en terme de qualité du carburéacteur final. Une « task force » « Into Plane Quality » et un groupe de travail « To Ensure the New Fuel Handling Standard Will Work with D1655 » visant à traiter ce sujet sont mis en place au sein de l’ASTM.

Enfin le processus de certification ne vise absolument pas à expliquer les phénomènes et reste généralement très factuel. Il doit donc s’appuyer sur des travaux de recherche permettant à la fois de prévoir les comportements, mais aussi éventuellement d’aider à la compréhension des résultats obtenus.

 

5. Les principales filières en développement

Comme indiqué précédemment, la seule voie pour l’aviation est de disposer de carburants parfaitement transparents du point de vue opérationnel avec le Jet fuel fossile actuel, pour aboutir à un carburant répondant aux spécifications aujourd’hui en vigueur : du point de vue de leurs structures chimiques les futurs carburants seront donc des molécules hydrocarbonées proches à celles présentes dans le kérosène fossile, et de fait de véritables « clones » de celui-ci. C’est le principe de la notion de drop-in.

Les voies impliquant des alcools non chimiquement transformés (éthanol, méthanol, butanol) ou des esters (esters méthyliques d’huiles végétales) développées et d’ores et déjà mises en œuvre pour le transport routier n’ont pas de sens pour l’aviation, pour des raisons opérationnelles (contenu énergétique, stabilité thermique, compatibilité avec les matériaux utilisés dans les circuits carburant…). Les carburants alternatifs tel que le gaz naturel liquéfié, ou encore l’hydrogène peuvent constituer des solutions intéressantes au niveau environnemental, mais posent de nombreuses questions. Ils constituent donc des solutions à étudier, mais dans une optique long terme.

De nombreuses filières de production de carburants alternatifs « drop-in » peuvent être envisagées, à partir de nombreuses matières premières fossiles (gaz naturel ou de synthèse, charbon) ou biomasse (cultures dédiées, déchets organiques…) suivant trois grandes familles de procédés : 

Les procédés dits « thermiques » (Fischer-Tropsch, liquéfaction) : Ces procédés passent par une première étape de « déstructuration » de la matière première pour la transformer en un produit intermédiaire plus facilement manipulable et traitable (gaz de synthèse, bio-huile). Ce produit est ensuite amélioré par différents types de procédés pour aboutir au carburant fini.

Les procédés dits « catalytiques » (hydrotraitement d’huiles végétales (HEFA), déshydratation / oligomérisation d’alcools (« Alcohol to Jet », AtJ)) : Ces voies utilisent des procédés catalytiques d’hydrogénation et de transformation de la matière première,

Les procédés dits « biologiques », qui utilisent des micro-organismes (levures…) pour transformer une matière première directement en molécules hydrocarbonées.

La production de carburants alternatifs drop-in peut être divisée en plusieurs phases présentant chacune des verrous technologiques et impliquant des acteurs différents (figure 8). 

Phase 1 : collecte de matière première et (éventuellement) pré-transformation en un produit intermédiaire « uniformisé »

Phase 2 : transformation finale en un hydrocarbure liquide miscible au kérosène fossile à une teneur maximale dépendant du procédé.

Phase 3 : mélange pour obtenir du carburant drop-in bio-kérosène ou kérosène de synthèse.

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Fig.8 : Résumé des étapes des 3 grandes catégories de procédés de production de biojets

 

Dans les faits, la situation est beaucoup plus complexe que ce simple tableau. En effet :

il est possible d’appliquer plusieurs procédés différents à la même matière première. Ainsi un sucre peut être transformé directement via une voie biologique, ou via une voie catalytique, ou même indirectement en tant que nutriment pour des micro-organismes lipidiques (levures, micro-algues) puis par hydrotraitement

en faisant varier les procédés ou enchaînements de procédés, on peut accéder à tout un panel de compositions chimiques, allant du produit purement paraffinique (intéressant du point de vue émissions polluantes, mais limité en termes de taux d’incorporation pour des raisons de compatibilité joints) au produit « mélangé » contenant des molécules de diverses familles chimiques et donc potentiellement certifiable à 100%.

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Fig. 9 : Filières examinées au sein du sous-comité carburants de l’ASTM International ( FAA, Juillet 2014)

 

Le schéma de la figure 9 résume les différentes filières envisageables et certifiées.

Actuellement, 3 filières « drop-in » sont certifiées (et peuvent donc être d’ores et déjà être utilisées en mélange pour des vols commerciaux) :

  • La filière « FT » (Fischer-Tropsch), à 50%, permettant la production de carburéacteurs synthétiques à partir de ressources telles que le charbon, le gaz ou la biomasse,
  • La filière « HEFA » (Hydrotreated Esters and Fatty Acids), à 50%, permettant la production de carburéacteur à partir de ressources oléagineuses (huiles végétales, huiles usagées, huiles algales),
  • La filière « DSHC » ou « SIP » (Direct Sugar to HydroCarbons / Synthetic ), à 10%, permettant la production de carburéacteur par voie biologique à partir de sucres

La multiplicité de ces filières à l’étude peut sembler surprenante, mais est symptomatique d’une complexité liée au fait qu’aucune de ces filières ne surpasse les autres en tous points, et que chacune possède des forces mais également des faiblesses. Le choix d’une filière ou d’une autre dépendra donc de la ressource disponible, de son accessibilité, du type de carburant fourni, des marchés « annexes »… La (ou les) solution(s) choisie(s) sera(ont) donc inévitablement différente(s) d’un pays à l’autre, et les développements de ces filières se feront en parallèle. 

Il n’existe actuellement pas d’industrie de production de carburéacteurs alternatifs en tant que tel. Des unités de production de biocarburants avancés ont été mises en place et permettent de produire du biodiesel (on peut notamment citer les unités d’hydrotraitement d’huiles végétales de NESTE (Finlande, Pays-Bas), l’unité à venir de Total au sein de la raffinerie de la Mede, ou les unités Total / Amyris au Brésil). Ces unités sont potentiellement capables de produire des biojets certifiés, mais ne le font pas principalement pour des raisons de demande. Ces carburants restant significativement plus chers que les filières fossiles (et encore plus avec un baril de pétrole autour de 50$ !) et aucun mécanisme permettant de réduire cet écart n’est actuellement en place. De nombreux travaux sont en cours, notamment au sein de l’OACI, afin de définir à la fois des processus de certification environnementaux communs de ces filières, mais aussi un cadre général à des mesures de marché incitatives. Enfin la nature internationale du transport aérien, fait que toute initiative liée au développement des carburants alternatifs doit être prise au niveau international pour éviter des distorsions de concurrence entre les compagnies aériennes.

 

6. Conclusion

Les carburants alternatifs durables, dans la mesure où un volume suffisant pourrait être disponible, ont un potentiel extrêmement intéressant dans la lutte pour la réduction du CO2 du transport aérien. De plus, ils peuvent apporter une diversification de ressources au niveau géostratégique et potentiellement financier. Enfin le recours à de nouveaux procédés de production ouvre la voie à des formulations dans les limites drop-in, permettant une diminution notable des émissions de particules.

Afin de permettre le développement de ces filières tout en conservant un niveau optimal de sécurité, une procédure de certification / qualification des carburants alternatifs a été mise en place au niveau international (ASTM). Ce processus est complexe, long et coûteux, mais nécessaire pour assurer le maintien d’un haut niveau de sécurité des vols. Il s’agit de plus d’un processus séquentiel et consensuel, basé sur des interactions constantes entre les producteurs de carburant et les industriels du domaine aéronautique.

Actuellement, 3 filières « drop-in » sont certifiées (et peuvent donc être d’ores et déjà être utilisées en mélange pour des vols commerciaux) :

  • La filière « FT » (Fischer-Tropsch), à 50% d’incorporation
  • La filière « HEFA » (Hydrotreated Esters and Fatty Acids), à 50% d’incorporation
  • La filière « DSHC » (Direct Sugar to HydroCarbons), à 10% d’incorporation

Un grand nombre de filières nouvelles ou d’amélioration de filières existantes sont en cours de certification au niveau de l’ASTM.

La dynamique de déploiement industriel est lente et timide sur le moyen terme (2020) en raison de la faiblesse du « business case » et en l’absence d’accord international sur des mécanismes permettant le développement de ces filières. Les ambitions sur le long terme (2050) pour les biocarburants aéronautiques supposent des progrès technologiques pour améliorer les rendements et les coûts de production et une approche économique intégrée des écosystèmes régionaux.

Une forte implication des motoristes sur le sujet est nécessaire. Le groupe Safran est fortement présent sur cette thématique, avec des projets de recherche (projets nationaux CAER et MOCCASSIN) et de démonstration (projet national Lab’Line). Plus généralement, il convient de souligner que l’optimisation de la composition des carburants futurs est un axe de recherche important pour le futur, quelle que soit leur origine (fossile ou alternatif). ?

 




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