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« De Verdun à Rio Albert Caquot Itinéraires d'un génie » par Jean-Bruno Kerisel aux Éditions Itinéraires
Malgré son titre, ce livre ne raconte pas la vie d’Albert Caquot et c’est très bien ainsi, la biographie d’Albert Caquot ayant déjà été faite et fort bien faite par son gendre, Jean Kerisel 1, père de Jean-Bruno Kerisel, l’auteur de cette exo-fiction.
Aussi Jean-Bruno Kerisel a pris le parti de faire un portrait intime d’Albert Caquot en le mettant en scène dans un récit dont il n’est pas le personnage principal, mais le mentor du héros. Il procède par allusion, nous livre un portrait de son grand-père par petite touche, comme un peintre le ferait, en nous contant la vie d’un contemporain de son grand-père : Louis Mangin, décédé quelques mois après Albert Caquot avec lequel il a entretenu une correspondance tout au long de sa vie.
Début 1917, Louis Mangin, ingénieur des Arts et Métiers, est affecté à la 68e compagnie du 2e régiment d’aérostation. Fin 1917 il fait la connaissance d’Albert Caquot à Chalais-Meudon, où il deviendra son second pour la réalisation des ballons d’observation.
Après la guerre, il obtient un diplôme d’architecte et fort de cette double formation, frappe fin 1920 à la porte du bureau d’étude d’Albert Caquot. Il participera ainsi à tous les projets d’après-guerre du « patron ».
En août 1923, Louis Mangin se marie avec sa belle-sœur Marie, veuve de son frère le capitaine François Mangin, mort pour la France. Malheureusement Marie décède en 1928. Pour aider Louis à surmonter sa peine, Albert Caquot l’associe au projet de la structure en béton armé du Christ rédempteur au mont Corcovado à Rio de Janeiro, œuvre du sculpteur Paul Landowski.
En 1932, il épaule Albert Caquot pour le suivi des travaux de la Grande soufflerie de Chalais-Meudon, confiés à Antonin Lapresle, collaborateur et successeur de Gustave Eiffel dans sa soufflerie d’Auteuil. Puis ce sera en 1934 la concrétisation d’une attirance ancienne pour la vie monastique avec son entrée comme novice dans un couvent bénédictin. Il finira sa vie à l’abbaye bénédictine d’Abu Gosh en Israël.
Ici l’auteur fait vivre d’autres pans inconnus de l’histoire. Le héros rencontre à Paris le poète Guillaume Apollinaire, lui aussi au front pendant la Première guerre mondiale, laissant avec humour ces lignes sur les ballons d’observation :
Il y a dans le ciel six saucisses et la nuit venant on dirait des asticots dont naîtraient les étoiles …
D’autres célébrités sont approchées, le cinéaste Jean Rouch, le compositeur Reynaldo Hahn et l’architecte Oscar Niemeyer, ce qui confère à ce livre un intérêt soutenu, qui ne se dément pas tout au long des pages, témoins de l’histoire d’un siècle marqué par de grandes réussites industrielles, en dépit des deux guerres mondiales qui l’ont ensanglanté. La figure d’Albert Caquot résume bien les progrès de cette époque dans le domaine de l’aéronautique et du génie civil.
L’auteur conclut :
« Nous avons plus que jamais besoin d’ingénieurs visionnaires, comme il l’a été en son temps. De nouveaux poètes devraient surgir, tels ceux qu’il décrivait dans un mémoire sur la locomotion aérienne en 1911 :
L’ingénieur, poète de notre époque, a réalisé ce rêve aussi vieux que le monde. Il a dompté la matière, construit un oiseau aux ailes soyeuses et au cœur d’acier, et il l’a lancé chaque jour avec plus de succès à la conquête de l’air ».
1. Jean Kerisel, Albert Caquot, 1871-1976 : Savant, soldat et bâtisseur, Presses de l’école nationale des Ponts et Chaussées, 2001.
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